K?CHLIN Raymond

Cette notice remplace celle qui a figuré dans une précédente édition.

(Mulhouse, 1860 ? Paris, 1931)

Amateur et collectionneur d?arts japonais, islamique, français médiéval et moderne.

Issu d?une grande famille protestante et industrielle alsacienne, il est rédacteur de politique étrangère au Journal des Débats (1885-1900), collaborateur des Annales et occupe la chaire d?histoire diplomatique à l?université libre des sciences politiques (1889-1900). Après la mort de son épouse (1893) et de son père (1895) qui lui assure une grande aisance financière, il renonce progressivement au journalisme et se consacre exclusivement à l?art.

Éclectique, sa collection comprend des pièces médiévales, islamiques, chinoises, des estampes japonaises, de la peinture moderne. Elle reflète son insatiable curiosité mais aussi celle d?un cercle de collectionneurs, la seconde génération de collectionneurs d?arts orientaux, formée par Louis Gonse* et le marchand japonais Tadamasa Hayashi. Il décrit dans les Souvenirs d?un vieil amateur d?art d?Extrême- Orient (1930), la vie et les passions de ce cercle qui se réunit dans des « dîners japonais » où chacun apporte la pièce la plus remarquable de sa collection. Se croisent les grands noms du collectionnisme français, Isaac de Camondo, Henri Vever, Edmond de Rothschild, Jacques Doucet. D?abord « horripilé » par la vague de japonisme, il n?est venu aux estampes qu?avec l?arrivée sur le marché de pièces de grande qualité dans une volonté de s?écarter d?un exotisme de bazar par la connaissance.

Remarquable médiéviste, K?chlin commence par étudier la sculpture gothique et publie deux ouvrages fondamentaux : La sculpture à Troyes et en Champagne méridionale au XVIe (1900) avec Joseph Marquet de Vasselot (1871-1946) et Les ivoires gothiques français (1924). Il appliquera les mêmes efforts de classification aux arts japonais et islamique.

Avec ses deux compagnons de route, le peintre Étienne Moreau-Nélaton (1859-1927) et Gaston Migeon*, K?chlin s?engage dans la vie des collections publiques : il devient membre du Conseil des musées nationaux et membre de le Société des amis du Louvre (1897), dont il est président de 1911 à 1930, s?impliquant  fortement dans la redécouverte de la Joconde volée en 1911. Vice-président de l?Union centrale des arts décoratifs, il encourage l?Art nouveau et le renouvellement des arts décoratifs français par le contact des productions orientales. Avec Migeon, il est l?organisateur de l?Exposition des arts musulmans (Paris, 1903) et de six expositions consacrées à l?Estampe japonaise (1909-1914). Même s?il s?appuie sur une méthode moderne, la photographie, K?chlin représente une veine plus conservatrice qui fait primer l?observation des qualités plastiques des arts orientaux (l?arabesque !). Il partage avec un cercle d?amateurs la conviction que les arts orientaux constituent une tradition qui confirme les expériences modernes et leur goût pour l?art contemporain. Personnalité relais entre les collections privées et le domaine public, il fait entrer dans les collections nationales les arts islamique et japonais, l?art du XIXe français et son avant-garde durant ses trente années à la tête des institutions de soutien aux musées nationaux. Par le legs de sa collection en 1932, Il imprime officiellement dans les musées français, les goûts et la curiosité du milieu parisien du premier tiers du XXe siècle.

Jean-Gabriel Leturcq

ALFASSA Paul, « Raymond K?chlin », Notices lues aux assemblées générales de la société des Amis du Louvre, 30 avril 1932. GUÉRIN Marcel, « Raymond K?chlin et sa collection », Bulletin des Musées, 1932, pp. 66-68. TOMASI Michèle, « L?objet pour passion : remarques sur la démarche intellectuelle de Raymond Koechlin (1860-1931), historien de l?art », Histoire de l?art, 58, avril 2006, p.133-144.



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