Cette notice remplace celle qui a figuré dans une précédente édition.
(Ottlaka, Hongrie -aujourd’hui Graniceri, Roumanie-, 1856 – Zurich, 1919)
Architecte, conservateur du musée de l’art arabe du Caire.
Né d’une famille modeste hongroise et après des études d’architecture à Budapest et Vienne, Max Herz se rend par hasard en Italie puis en Égypte en 1880. Au Caire, l’architecte allemand Julius Franz Pacha lui offre un poste d’architecte du Bureau Technique de l’Administration des waqfs (1881-1890). En 1888, Herz entre au Comité de conservation des monuments de l’art arabe du Caire fondé en 1881 au sein de l’administration des waqfs pour recenser, protéger, conserver et restaurer les monuments « arabes » et créer un Musée National d’art arabe. De 1890 à 1914, architecte en chef, Herz exerce la plus haute fonction du Comité. Il s’occupe de tout, des projets les plus importants (restauration du complexe de Sultan Hasan) aux détails mineurs. Par sa formation et ses origines, Herz est plus proche des théories de Riegl et Dehio que de Viollet le Duc ou Ruskin et privilégie la conservation sur la restauration. Ses travaux sont tous entrepris sur la base d’une documentation précise, des relations de voyage et des sources arabes. En quelques années, Herz devient un arabisant reconnu de ses pairs et le correspondant régulier de Max Van Berchem*. Il étend la compétence du Comité hors du Caire et visite la plupart des pays voisins. La documentation et la recherche des méthodes originelles sous-tendent les méthodes de restauration raffinées et précises du Comité. Les éléments nouveaux sont ajoutés et différenciés, précisés par la date de restauration intégrée au décor. On a cependant critiqué sa méthode de mise en valeur, la seule valide à cette époque, qui consiste à isoler les monuments du tissu urbain.
Herz est aussi un architecte prolifique qui a joué un rôle important dans l’émergence du style historiciste néo-mamelouk au tournant du siècle. Il réalise plus de 150 bâtiments résidentiels au Caire, la transformation dans le style néo-mamelouk du bâtiment principal de l’Université américaine et assure l’achèvement de la mosquée al-Rifa’i (1912). Il est le maître d’œuvre de la « rue du Caire » à l’exposition de 1893 à Chicago.
Conservateur du Musée arabe (1901-1914), Herz œuvre à l’institutionnalisation du musée qui ouvre en 1903 dans un bâtiment néo-mamelouk. Les plans sont de l’architecte italien Manescalco mais il en a dirigé les travaux et dessiné le mobilier. Herz et Bahgat* œuvrent à l’accroissement des collections soit en récupérant le mobilier des monuments de la ville, soit par des acquisitions pour lesquelles l’obtention de moyens génère des débats sur la définition même de l’art arabe ou musulman. Les deux hommes entrent en conflit et Herz laisse la direction du musée à Bahgat pour se consacrer à la protection des monuments coptes. En 1898, lorsque l’art copte entre enfin dans les prérogatives du comité, Herz milite pour la création d’un musée copte. Comme il se heurte au clergé sur des problèmes juridiques de propriété et de culte, le substrat des collections est donné à Maspero* sur les fonds du Musée égyptien. Le Musée copte ne sera inauguré qu’en 1914, après son départ, dans un bâtiment, pastiche d’architecture fatimide conçu par lui.
Encouragé par Maspero à ouvrir au public en particulier égyptien, il publie le catalogue du Musée (1896, 1905) et les monographies sur les mosquées Sultan Hasan et al-Rifa’i. Son œuvre principal est le Bulletin du comité de restauration des monuments de l’art arabe qui rend compte des activités du Comité et publie les études menées sur les monuments, des méthodes de construction aux manuscrits arabes. Ils constituent une source de première importance pour l’étude de l’architecture islamique en Égypte. Traduit en arabe par Bahgat, le Bulletin connaît un succès tel qu’il faut augmenter le tirage et rééditer les premiers volumes. Herz est par ailleurs l’auteur d’une histoire de l’art arabe en hongrois (1907) que Golziher dont il était proche, considérait comme son ouvrage le plus important.
Pour ses services rendus à l’Égypte, il est nommé Bey en 1895 et élevé au rang de Pacha en 1912, mais il est renvoyé au début de la guerre à cause de sa nationalité autrichienne. Personnage trop cosmopolite, le nom de Max Herz n’a pas été retenu, c’est Bahgat qui est resté le découvreur de Fustat et Simaïka* le fondateur du Musée copte. Avec le nouveau regard porté sur l’architecture « coloniale » en Égypte, son travail de sauvegarde, de reconnaissance et de diffusion de ce qui deviendra le patrimoine islamique national de l’Égypte est aujourd’hui réapprécié.
Jean-Gabriel Leturcq
ORMOS István, Max Herz Pasha (1859-1919): His life and career, 2 vol., Le Caire, IFAO, 2009. LETURCQ J.-G., « Un musée d’art arabe au Caire (1869-2010), du dépaysement au désenchantement réciproque ? » in F. Pouillon & J.-Cl. Vatin (dir), Après l’orientalisme, L’Orient créé par l’Orient, Paris, Karthala, 2011, p. 489-505.