GARNIER Francis

(Saint-Etienne, 1839, Hanoï, 1873).

Officier de marine, géographe, explorateur et aventurier.

Né dans une famille légitimiste (son père démissionna de l’armée en 1830), Garnier entre à l’Ecole Navale en 1856. Il navigue dans l’Atlantique sud, puis participe à la campagne de Chine de 1860 qui vit le saccage du Palais d’Eté, et à la conquête de la Cochinchine - il devient inspecteur des affaires indigènes et administrateur de Cholon. En 1864, il publie La Cochinchine française où il se fait l’avocat d’un agrandissement de la colonie vers la Chine. Mais il faut commencer par explorer. En 1866, le pouvoir impérial commandite une expédition scientifique où la géographie est la discipline englobante, sous les ordres du capitaine de frégate Doudart de Lagrée ; Garnier est son second. Depuis Saïgon, la colonne remonte le Mékong et s’arrête à Angkor, alors quasi-inconnu. Puis elle continue jusqu’au Yunnan, en Chine. Doudard, malade, meurt. Mais Garnier poursuit vers l’amont du fleuve, et rejoint le Yang-tsé Kiang, puis Shangaï d’où il embarque pour Saïgon en 1868.

De retour en France lors de la guerre franco-prussienne, il commande une canonnière sur le Rhin, puis une chaloupe sur la Seine. Il proteste contre la capitulation et se met en congé pour repartir en Indochine. Il publie en 1872, dans le Bulletin de la Société de Géographie, les « Nouvelles routes de commerce avec la Chine » où il formule son rêve de trouver un passage fluvial de l’Indochine à la Chine qui justifierait l’entreprise coloniale. En 1873, le Voyage d’exploration en Indo-Chine, d’abord paru dans Le Tour du Monde (1870-1871) sort chez Hachette. L’ouvrage « publié par les ordres du Ministre de la Marine » est un bilan de l’expédition de 1866-1868 : Garnier a rédigé une grande partie des 1 100 pages ; mais on y trouve encore 250 illustrations d’après des croquis de  Louis Delaporte*, des photos d’Emile Gsell* et un atlas in-folio dont certaines cartes ont été dressées par Garnier.

En 1872, il veut aller au Tibet pour trouver l’origine des grands fleuves de l’Asie. Retour par la Chine où il fait des observations aussi bien politiques que météorologiques. Il envoie des articles au Temps qui seront rassemblés en volume après sa mort (De Paris au Tibet, Hachette, 1882). Les autorités françaises lui ayant demandé d’assurer la liberté de circulation sur le Fleuve Rouge, il cherche à contrôler le Bas-Tonkin avec un détachement de quelques centaines d’hommes. Il s’empare, sans mandat, de la citadelle de Hanoï, mais des résistants sino-vietnamiens, les « Pavillons Noirs », contre-attaquent : Garnier est tué et décapité. Lui succédera Paul Philastre* qui n’est pas animé par le même esprit de conquête impériale.

Le président de la Société de Géographie*, l’amiral de la Roncière rapprochera sa mort de celle de David Livingstone, disparu la même année, et soulignera que Garnier avait « apporté à cette vaste science [la géographie] un tribut de travaux qui resteront comme un monument ». De fait, un monument à sa gloire est érigé en 1898 en haut du boulevard Saint-Michel : des femmes nues y figurent les fleuves qu’il explora ; l’une d’elles, munie d’un compas, mesure la terre.

Dominique Colas



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