Cette notice remplace celle qui a figuré dans une précédente édition.
(Akka, Maroc, 1826 – Alger, 1886)
Commerçant caravanier, guide saharien.
Né dans une communauté juive du grand Sud marocain, il se signale rapidement pour ses aptitudes intellectuelles, ce qui le fait envoyer à Jérusalem pour étudier dans une école rabbinique. Ce voyage est l’occasion d’un grand tour des communautés juives de la Méditerranée au Nord (Livourne, Salonique, Constantinople, Smyrne, Alep) comme au Sud (Alexandrie, la Cyrénaïque, la Tunisie…). Sur la route du retour, il découvre le commerce caravanier transsaharien et forme le projet d’ouvrir des relations avec la légendaire Tombouctou, cité en principe interdite aux non-musulmans. Il réussit à y commanditer des caravanes à partir de Mogador (Maroc atlantique), ce qui entame le monopole anglais sur les plumes d’autruches...
Rentré au Maroc suite à une mésaventure commerciale, le consul de France à Mogador, Auguste Beaumier, va chercher à l’approcher pour recueillir des informations sur les routes commerciales du Sahara occidental. Il en tire un important article sur « Le premier établissement des Israélites à Tombouctou » (Bulletin de la Société de Géographie de Paris, 1870), qui signale le rabbin à l’attention des sociétés savantes. Invité à Paris en 1874, celui-ci est sollicité de toute part (Le Monde Illustré, le Journal des Voyages, et même le Journal Officiel) et par tous ceux qui veulent, dans le sillage de René Caillé*, lancer une expédition vers Tombouctou. Ernest Cosson et Henry Duveyrier* le recrutent pour devenir auprès du Muséum d’Histoire Naturelle et de la Société de Géographie de Paris*, un informateur attitré sur un Sahara à peine exploré.
Au cours de l’année 1879, il est appelé à reconnaître l’itinéraire d’un possible chemin de fer transsaharien et il publie au Bulletin de l’Alliance Israélite Universelle, le récit d’une rencontre avec les Daga, tribu d’origine juive vivant parmi les Touaregs… En 1883, il est engagé, sur le conseil du responsable de la Bibliothèque d’Alger, Oscar Mac Carthy*, pour accompagner Charles de Foucauld* au cours d’un périple de onze mois à travers le Maroc insoumis, voyage qu’il réalise déguisé en rabbin. Grisé par son triomphe, le jeune explorateur en oublie ce qu’il doit aux communautés qui l’ont accueilli et à son dévoué compagnon de route. Sa Reconnaissance au Maroc (1888) traite avec sévérité les Juifs marocains et Mardochée, alors même que celui-ci, miné par les privations et la maladie, vient de mourir. Il finira par lui rendre justice sans cependant être suivi par les innombrables biographes qui célèbreront la mémoire de l’ermite du Sahara.
Jacob Oliel
OLIEL Jacob, Mardochée aby Serour, rabbin, caravanier, guide au Sahara, Élysée, Montréal, 2010.