LOUŸS Pierre LOUIS dit –

(Gand, Belgique, 1870 – Paris, 1925)

Écrivain.

Avec ses Chansons de Bilitis (1894) ou surtout Aphrodite (1896), le nom de Pierre Louÿs est plutôt associé à une évocation de l’Antique très « fin de siècle ». Le monde de l’Islam a néanmoins contribué à donner de la couleur et, si l’on ose dire, de la chair à la recréation d’une poésie grecque centrée déjà sur l’Orient méditerranéen.

Ami d’André Gide* dont il a été le condisciple à l’École alsacienne, c’est sur la suggestion de celui-ci qu’il renonce à une excursion au festival de Bayreuth, et s’embarque pour l’Algérie où il va retrouver à Biskra une petite prostituée des Ouled Naïls, Meryem Bent Ali, dont on lui a dit grand bien. Cette expérience de ce que l’on n’appelle pas encore le tourisme sexuel le marquera durablement. Pourtant, plus que la débauche, c’est la fraîcheur exotique de l’adolescente qui le séduit, et va le conduire à réécrire, sur des points importants, la supercherie littéraire qu’il élabore autour d’une poétesse fictive, « Bilitis ».

Bien qu’il trouve bientôt en Andalousie l’Orient intérieur qui lui inspire, dans la filiation de la Carmen de Mérimée*, son chef d’œuvre, La Femme et le pantin (1898), il va refaire plusieurs voyages à Alger : En 1895 d’abord - c’est là qu’il rompt avec Gide (et après lui avec Wilde) dont il ne supporte pas le « coming out » homosexuel ; l’année suivante, pour raison de santé cette fois. Il en ramène une demoiselle assez délurée, Zohra Bent Brahim, qui vit en posant pour les peintres. Personnage haut en couleur, elle lui sert quelque temps à faire scandale dans son milieu parisien, et offusquer notamment la famille de Heredia qui a préféré donner sa fille, Marie, à un rival plus fortuné, Henri de Régnier. L’Algérienne sera rembarquée quand les choses rentrent si l’on peut dire dans l’ordre, Marie décidant finalement de se garder pour Louÿs, à qui elle donne un fils, plutôt qu’à son mari légitime. Ces péripéties cocasses qui ont longtemps fait l’objet de supputations sont désormais bien connues grâce aux travaux de Jean-Paul Goujon à qui l’on doit la biographie la plus complète sur notre auteur (Fayard 2002).

C’est sous l’angle de la poésie que Louÿs va continuer à s’intéresser au monde de l’Orient, préfaçant par exemple une Anthologie de l’amour arabe (Mercure de France, 1902), recueil réuni par un certain Ferdinand de Martino qu’il a rencontré en Égypte où André Louis, son frère, est attaché d’ambassade. Comme tous ses contemporains, Louÿs tient bien sûr en haute estime la traduction des Mille et une nuits du Dr Mardrus*, Égyptien lui aussi. Érotomane distingué, Louÿs ne pouvait manquer de s’intéresser également aux traités d’érotologie arabes - notamment le Jardin parfumé du Cheikh Nefzaoui - qui connaissent en ce temps un franc succès.

François Pouillon

GHLAMALLAH Fathi, Pierre Louÿs, Arabe et amoureux, Nizet, 1992.



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