REICH Sigismund Sussia, alias David Storm RICE

(Schönbrunn, 1913 – Londres, 1962)

Historien des arts islamiques assez peu connu en France car il fit l’essentiel de sa carrière à l’Université de Londres, sa contribution à l’orientalisme francophone fut pourtant remarquable après que l’essentiel de sa formation eut été acquise dans les grandes institutions « orientalistes » de Paris. Il est surtout connu comme archéologue - il a procédé, à partir de 1951, à l’invention des ruines de Harran en Turquie - et comme historien des arts islamiques, mais sous le nom de David Storm Rice, patronyme qu’il adopte en 1945 après avoir obtenu la citoyenneté britannique.

Étrange itinéraire que celui de ce Juif autrichien parti avec ses parents, à l’âge de dix ans, dans ce qui était encore la Palestine sous mandat britannique - son père, ingénieur hydraulique, sera à Haïfa une figure de la colonisation juive. Après des études dans cette ville, à la Reali School qui dispense son enseignement en allemand, il repart dès 1931 en Europe, d’abord aux Beaux Arts de Florence puis, l’année suivante, à la Sorbonne, à l’EPHE et aux Langues O’*. Recruté comme membre correspondant de l’Institut Français de Damas, il conduit en 1936 une enquête linguistique, folklorique et ethnologique sur les trois villages du Qalamoun : Bakhaa, Jubbaadin et surtout Maaloula. Il bénéficie alors de l’aide de Jean Lecerf* et de Jean Cantineau*, collaboration qui est le reflet de l’atmosphère scientifique qui règne à l’IFD à sa grande époque. Il soutient ce travail comme thèse l’année suivante (Études sur les villages araméens de l’Anti-Liban, Damas, Documents d’études orientales de l’Institut Français, & Beyrouth, Imprimerie Catholique, 1937).

Affirmant d’emblée une curiosité très éclectique, Reich, qui maîtrise bien sûr l’arabe à côté de l’araméen, ne publiera plus rien se rapportant au christianisme oriental ou à l’étude des dialectes syriaques : il va alors s’intéresser à l’histoire de l’art culinaire arabe, à la fauconnerie et aux arts de la chasse et, plus généralement, aux arts décoratifs ; il développe également un intérêt pour l’archéologie islamique (céramique, cuivre et épigraphie dans laquelle il excellera plus tard, mais en anglais). Il n’y a que ses liens avec les milieux sionistes qui semblent pouvoir alors gêner son directeur, Henri Laoust* pour qui « il semblerait inopportun d’exposer l’Institut à des réactions d’opinions arabes qui restent toujours à redouter » (lettre du 2.01.1938, d’après Avez, p. 148).

Ayant fait la guerre au sein de l’armée britannique, comme officier de renseignement en Erythrée puis en Italie et en Allemagne, Reich revient à l’activité universitaire en Angleterre où, sous le nom de David Storm Rice, il enseigne l’histoire du Proche et Moyen-Orient à la School of Oriental and African Studies à partir de 1947. De 1959 jusqu’à sa mort en 1962, il conclut sa carrière comme Professeur d’Art et d’archéologie islamiques à l’Université de Londres. Sa dernière contribution en français est une étude, la plus complète à ce jour, sur un des joyaux de la collection d’arts islamiques du Louvre, un bassin décoré d’époque mamelouke connu sous le nom de « baptistère de Saint-Louis » (Ed. du Chêne, 1951).

Frédéric Pichon

WIET Gaston, “David Storm Rice”, Syria, 1963, pp. 382-385. SEGAL J. B., “Obituary David S. Rice”, Bulletin of the School of Oriental and African Studies, 962, pp. 666-671. AVEZ Renaud, L’Institut Français de Damas au palais Azem (1922-1946) à travers les archives, Damas, IFD, 1993.



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